7- Les 3 derniers mois de chimio
Les trois derniers mois de chimio se passent comme les premiers : Alternance de fatigue, de poussée d'aphtes. Par contre, apparaissent des peurs ou phobies que je n'avais pas auparavant. Comme la conduite : je conduis de moins en moins et lorsque je dois le faire, je roule lentement et j'ai peur des autres voitures.
Juste après l’opération du foie, les cheveux tombent par poignées. Il faut acheter une perruque au cas où ils tombent tous. Mon mari et moi prenons rendez-vous dans un institut spécialisé, et prévenons nos filles que je risque de renter la boule à zéro, mais avec une superbe coupe. L’accueil est chaleureux. La dame me passe la main dans les cheveux et constate que je les perds pas mal, mais elle m’annonce que je peux attendre encore un peu avant de les raser. Comme ils sont courts et peux épais cela ne se verra pas sous la perruque. J'essaye différents modèles, du plus fou au plus sage et repars avec un modèle identique à ma coupe actuelle.
Je suis sur internet une formation de conseillère en diététique (en vu de reperdre mes kilos) et je décroche mon diplôme mention très bien.
Les beaux jours me permettent de refaire mon jardin, et de me lancer dans une nouvelle activité : les palettes de bois. Je récupère des palettes de bois, les désosse et crée une multitude de choses avec (la porte d'une cabane de pêcheur pour cacher les containers à poubelle, un établie, des portes bijoux, des jardinières, des poissons pour décorer ...). Ma fille me dit un jour :"mais c'est génial les effets secondaires de la chimio !"
L'avant dernière chimio sera la pire. Les 1h45 de perfusion me paraissent une éternité. J'ai la nausée et je ne trouve aucune position confortable sur le fauteuil. Je n'en peu plus de ces séances, j'ai hâte de finir. Fort heureusement, la dernière chimio sera la plus agréable. La fin de cette année de traitement est palpable.
L'heure est au bilan. Mes marqueurs tumoraux sont redevenus normaux. Le foie à complètement repoussé. Je suis en rémission. Il me reste toutes mes cicatrices (celles visibles sur mon corps et celles intérieures), mon port-à-cath (je ne souhaite pas le retirer avant la fin des 5 ans de contrôle), mes cheveux filasses, ma peau ravagée et mes 6 kg de plus. Mais je suis en vie !
Le combat n'est pour autant pas fini. Très souvent les patients qui ont vaincu un cancer tombent dans la dépression. Ce ne sera pas mon cas mais cet "après" est plus difficile que cette année de soin. Toute la pression retombe et on réalise que l'on est passé pas loin de la mort. On vie avec la certitude que l'on est mortel. On a perdu cet insouciance qu'ont les bien portants. On a la fameuse épée de Damoclès au dessus de la tête. Et on a toutes ces questions sans réponse. Pourquoi moi ? Pourquoi à 42 ans ? Depuis combien de temps j'avais ça en moi ? Reviendra-il ?
Je dois me sevrer des somnifères. Je passe des nuits blanches. J'entame un régime car je ne supporte plus mon corps. Mais j'ai la niaque. Je récupère progressivement au niveau du jogging. 3 semaines après l'arrêt de la chimio je cours avec mon mari les 8 km de Chatou. Je les fini péniblement en 51 min et 47 s. Une petite victoire de plus néanmoins.
