10-LA REVANCHE n°2
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Trois semaines après mon semi, une idée me trotte dans la tête... Je fais quelques calculs : 21 km (l'équivalent du semi) en sous régime (9km/h), ça fait 2 h 33. Reste 21 km en baissant à 8 km/h et éventuellement en finissant en marche rapide à 6.5 km/h. Le tout est jouable en 6h (temps maximum autorisé) pour ces 42.125 km. Je suis décidée. "Béton" dans ma tête. Ma dernière revanche : mon marathon volé par ce crabe. Je suis prête, quitte à le finir en rampant. Ce n'est pas lui qui aura le dernier mot !!!
Via internet, je rachète le dossard d'une runneuse blessée.
La veille, c'est évidement avec ma copine du bloc, marathonienne, que nous dégustons notre dernière assiette de pâtes. Et nous nous mettons dans l'ambiance. J'écoute ses précieux derniers conseils. Le lendemain nous nous retrouvons sous un beau ciel bleu. Nous sommes dimanche, 8 h 30 du matin et pourtant le métro est bondé. Que des sportifs en shorts et tee shirt. Tous joyeux, impatients. Les Champs Elysées sont également noirs de monde. C'est irréel. Magique.
Ma joie est indescriptible. Je savoure chaque seconde. Je me repasse dans ma tête mon plan de course : Partir tranquille, ne pas s'emballer. Bien s'hydrater. Les gels à prendre à des kilomètres précis. Ecouter son corps. Finir.
Quelle course ! Les rues de Paris nous sont entièrement réservées. Nous passons à proximité des plus beaux monuments. Sur les bas-cotés il y a des animations. Des gens venus nous encourager... Des stands de ravitaillement (eau et fruits) tous les 5 km. Compte tenu de la chaleur, des pompiers nous arrosent avec leur lance à incendie régulièrement. On échange quelques mots entre coureurs, quelques plaisanteries, des encouragements, au fil des kilomètres.
Au bout de 25 km je commence à ressentir des débuts de crampes dans les orteils. Je m'hydrate plus et ralentie un peu, mais aucune autre douleur. Au 30ème km les organisateurs ont représenté un mur de chaque coté de la rue : le fameux mur du marathonien (lorsque l'on a épuisé toutes ses réserves et que l'on ne peut plus avancer). C'est avec un grand soulagement que je le franchie, mais il faut rester à l'écoute de son corps car il reste encore 12.125 km. Sur les cotés de plus en plus de coureurs marchent ou sont assis, blessés. La sécurité civile et le SAMU se succèdent. Le 40ème km !!! Une vague d'émotion me submerge, une envie de pleurer. Je courre toujours alors que je pensais finir en marchant. Je repense à cette année de chimio, aux opérations, au chemin parcouru. Je pense à mes proches qui m'ont accompagnés dans la maladie, qui m'ont portés à bout de bras dans les moments les plus difficiles. C'est pour eux que j'irai jusqu'au bout.
Je le finirai en 5 h 08. Sans blessures et en courant !